Thérapie de couple ou couples en thérapie ?
La question n’est pas aussi simpliste qu’il y paraît. Lorsque je reçois un couple en difficulté, c’est surtout à cette entité, le couple, que nous allons nous efforcer d’apporter notre attention, de lui que nous allons prendre soin. Cela peut paraître abstrait, « le couple », sachant que cette apparente unité est constituée de nombreux éléments : chaque membre du couple, pour commencer, vient avec ses propres enjeux. A ce titre, on peut établir une première équation : le couple, c’est 1+1=3, chaque membre et l’entité qu’ensemble ils forment. Mais chacun vient également avec sa propre histoire, pas uniquement les enjeux du moment. Partant du postulat que chacun a au moins deux parents (qu’ils soient connus du patient ou pas, quel qu’en soit le sexe et quelles que soient les modalités de la procréation qui a permis la venue au monde du patient), notre équation se présente désormais ainsi : 1+1=7 (chaque membre, les deux parents de chaque membre, l’entité couple). Cela ne s’arrête pas là : chacun a des grands-parents, des arrière-grands-parents – ce que l’on appelle un arbre généalogique. Cela en fait du monde dans un couple !
A cela s’ajoute le fait que, parfois, l’un des membres du couple, voire les deux, est déjà en thérapie individuelle : à la thérapie du couple s’invite alors aussi le ou les thérapeutes de chacun.
Vertigineux, n’est-ce pas…
Alors qu’au départ, le couple vient « simplement » parce que « quelque chose ne va pas », une insatisfaction, ou une crise plus grave, et avec l’espoir qu’en parler à un tiers, un professionnel de la question, leur permettra d’améliorer la situation – ou de mettre un terme à la relation, à leur couple, d’une manière aussi pacifique que possible.
Cette demande d’un soulagement à court terme est bien entendu légitime ; elle ne doit cependant pas occulter les enjeux plus profonds, et les deux temporalités seront toujours présentes dans le travail d’accompagnement – mais pas forcément au même moment : il y a le travail que nous effectuons en séance, ensemble, le couple et le thérapeute, et le travail qui se fait en chacun, parfois dans l’inconscient, entre les séances.
Une thérapie de couple proposée par un praticien Gestalt
C’est pour cette raison que je me suis formé à l’accompagnement des couples par la Gestalt-thérapie. Cette méthode propose des outils simples que l’on peut mettre en œuvre dans l’ici et maintenant de la séance : par exemple, chaque membre du couple est invité à dessiner, par des cercles, sa représentation du couple, puis à le présenter à l’autre – les échanges qui en résultent peuvent être d’une grande richesse. D’autres expériences mettent en mouvement le corps ou la disposition de chacun dans l’espace de la séance –le thérapeute veillant à ce que chacun se sente respecté : les expériences (même la plus anodine, comme la réalisation d’un dessin) toujours je les propose, et chacun est libre de les accepter ou pas ; le refus peut d’ailleurs à son tour fournir l’occasion d’une élaboration féconde.
Psychanalyse et thérapie de couple
Cette méthode n’exclut pas l’écoute psychanalytique : quand je travaille avec un couple dans l’instant présent, je veille toujours à entendre ce qu’exprime chacun du couple, parfois d’une manière dont il n’aura pas conscience, à travers un geste, une intonation, un mot qui se singularise. Si cela me paraît opportun, je le fais remarquer et nous effectuons ensemble une élaboration sur ce jaillissement de l’inconscient.
Alors, thérapie de couple ou couples en thérapie ? Ce qui me paraît important, c’est que le travail, c’est bien le couple qui l’engage, sous l’accompagnement du thérapeute. Et dès lors qu’un couple franchit le seuil de mon cabinet, nous pouvons dire qu’un travail est déjà engagé – fragile peut-être, mais bien réel – et qu’il est engagé par ce couple, peut-être fragilisé par sa situation, mais bien réel lui aussi.